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Association pour l'étude et la Sauvegarde des Vestiges du Canal de Louis XIV et de ses environs

HISTOIRE DU CANAL D'EURE

Aqueduc royal de Pontgouin à Versailles

Avant de conter et d'expliquer l'historique des travaux du canal entre la rivière d'Eure et Versailles pour amener l'eau, beaucoup d'eau au château, il est important, d'abord de porter un regard admiratif sur les travaux entrepris à Versailles, où le roi souhaitait mettre en scène son spectacle unique des grandes eaux. Pourquoi fallait-il tant d'eau pour le château de Versailles ? Et comment est-on arrivé à capter la rivière d'Eure à Pontgouin pour alimenter les bassins du parc du château ? Louis XIV avait fait aménager le parc autour du château, et la multiplication des fontaines et réservoirs nécessitait beaucoup d'eau, jusqu'à en manquer.

Comme une obsession, le roi désirait cette eau, pour le beau, pour la grandeur, mais surtout parce que cet élément naturel était indispensable pour mettre en scène tout l'ensemble du décor merveilleux réalisé par les plus grands artistes du moment.

Cette machinerie fut le triomphe de Le Nôtre, de l'ingénieur Gobert, de Francine, et de Denis-Jolly, le maître fontainier. L'eau ne manquait pas, bien au contraire, mais elle n'avait pas de pression pour s'élever en jet.

Mais Versailles, sans rivière, va donc obliger le roi à devenir le catalyseur de toutes les énergies et des technologies nouvelles de l'époque pour obtenir cette impalpable et mystérieuse eau.

 

Les premiers systèmes d'arrivée d'eau à Versailles

L'étang de Clagny :

Il y eut dès 1665, le captage des eaux du grand étang de Clagny, à 600 mètres du château. C'est Louis XIII qui avait fait creuser cet étang. La pompe de la ménagerie, puis celle de la tour d'eau étaient entraînées par deux manèges à chevaux. Mais ce système ne fournissait que 600m³ par jour. Puis en 1666, trois moulins à vent puiseront dans l'étang et monteront l'eau en trois paliers sur le toit de la grotte de Thétis. Un autre moulin ramenait les eaux dans l'étang. Mais ce système ne pouvait servir qu'à de brèves démonstrations. (L'étang de Clagny a été asséché au XVIIIe siècle. Ce fut ensuite l'emplacement d'une demeure de la Pompadour, puis de nos jours le quartier Notre-Dame).

Captage des eaux de la Bièvre :

C'est une petite rivière qui coule à quelques kilomètres de Versailles, derrière la colline de Satory, près de l'étang de la Minière. Le cours de la rivière fut barré et l'on construisit une machine de 20 mètres de diamètre qui actionnait une pompe. En 1671, au moyen de cinq moulins à vent, qui reprennent le système des paliers, on élèvera l'eau à l'étang de Satory creusé à cette occasion. L'eau arrivera dans les réservoirs sous la terrasse du château. L'accroissement des besoins - on commence à creuser le grand canal – démontre assez rapidement l'insuffisance de ce nouveau système de captage. Il y aura des projets de drainage au nord de Versailles, mais un autre système d'alimentation est alors recherché.

La Machine de Marly :

En 1680, Louis XIV demande à tous les responsables de grands projets de rechercher tous les gens qui auraient des connaissances des problèmes de l'eau, soit dans l'Etat, soit dans les pays voisins.

Un Liègois, Arnold Deville, avait vu près de chez lui une machine qui montait l'eau à 15 toises. Cette machine avait été fabriquée par un charpentier, Rennequin Sualem.

Ils vinrent à Versailles et les travaux commencèrent en 1681. Cette formidable machine, fort bruyante, ne tenait pas toutes les promesses que l'on en attendait. C'était une belle réalisation mais son application se révélait insuffisante. La machine ne fournissait que 3200m³ par jour. Elle coûtait fort cher (70.000 livres par an) et occupe une cinquantaine de compagnons car elle devait être souvent restaurée. Il fallait trouver une rivière plus haute que Versailles.

Elle subira plusieurs transformations dès 1695, puis en 1754. Bien d'autres projets de modernisation échouèrent, et elle disparut en 1817. Une autre lui succéda, fut arrêtée en 1963, pour disparaître définitivement en 1968.

 

Les étangs et les rigoles du plateau des Yvelines

Le roi, qui aimait "tyranniser" la nature, avait dès 1671 fait rechercher de l'eau sur le plateau des Yvelines. Et ce fut ce gigantesque travail qui nous a laissé les étangs et les rigoles du plateau.

Le réseau supérieur :

Après avoir démontré par ses calculs qu'il n'était pas possible de capter les eaux de la Loire et de les faire venir à Versailles, comme l'avait demandé Colbert, l'Abbé Picard, inventeur du niveau à lunettes (il est membre de l'Académie des Sciences et doit son prestige de sa mesure de l'arc du méridien) explore le plateau des Yvelines entre Trappes et Rambouillet, se rend compte qu'il y a de nombreuses mares et petits étangs dans cette région assez humide. Il pense qu'il serait possible d'exploiter ces eaux en les drainant car il a mesuré que ces mares ont un niveau supérieur à celui du château de Versailles. Il estime donc qu'en utilisant les lois naturelles de la gravitation, l'eau pourrait s'écouler librement vers les réservoirs de Versailles. Ce résultat satisfait pleinement les fontainiers et ce nouveau réseau arrêtera progressivement les prélèvements dans l'étang de Clagny. Cette découverte est transmise au roi, qui accorde toute confiance à ses savants en hydrographie et il donne toutes instructions à ses ministres. Vauban sera chargé d'établir les plans et les ouvrages.

Vauban va tisser une véritable toile d'araignée de rigoles et de fossés pour recueillir toutes les eaux de ruissellement. Il va creuser des petits canaux, maçonner des petits aqueducs. Il va agrandir les mares pour en faire des étangs. Il va les relier entre eux par une rivière artificielle appelée "Rivière Royale", qui conduira l'eau, tantôt à l'air libre, tantôt souterrain, vers l'étang de Saint-Quentin. De là, l'eau descendra par conduites vers les réservoirs nouveaux de Versailles.

Entre l'étang de la Tour près de Rambouillet et l'étang de Saint-Quentin près de Versailles, le captage des eaux sur 15 000 hectares représente 200 kilomètres de conduites, de fosses ou de rigoles. Quant à la "Rivière Royale", elle court sur plus de 34 kilomètres, traverse 15 communes et draine les eaux de 15 étangs. Ils retiennent environ 8 millions de m³.

On peut encore voir ces étangs et ouvrages, dont 20 kilomètres d'aqueducs souterrain, et les rigoles aux noms désuets.

Le réseau inférieur :

Il est identique, il relie les étangs d'Orsigny, de Saclay et du Trou Salé, par le très bel aqueduc de Buc sur les réservoirs de Versailles. Cet ensemble fut la seule réalisation achevée avant la mort de Colbert qui fonctionnait convenablement.

Le roi, habitué à se considérer comme le plus grand, même devant les éléments, décida alors d'une "cruelle folie", comme l'écrira plus tard Saint-Simon.

 Le canal de Pontgouin à Versailles

En 1684, le roi est arrivé au plus haut de sa grandeur et de sa puissance. Il épouse secrètement Madame de Maintenon.

La guerre et les impôts épuisent le royaume. La taille pèse lourdement sur les paysans et la misère est grande.

Seuls les fastes de la Cour, semblent apaiser ces petites inquiétudes politiques, tout est prétexte à fêtes, et ces fêtes ne peuvent se concevoir sans la féerie des eaux. Sans cet élément liquide, dirigé et projeté avec force, les fêtes perdaient leur magnificence. Aussi le roi chargea Louvois de trouver d'autres moyens pour amener l'eau à Versailles.

Louvois s'est rendu compte que tous les systèmes en place n'étaient pas parfaits et pourraient être améliorés. Il se rend compte que pour avoir un apport plus grand et plus régulier, il est indispensable d'amener dans les étangs du plateau des Yvelines le débit constant d'une rivière. La rivière la plus proche des étangs du plateau est l'Eure. L'étang le plus près de cette rivière est l'étang de Tour, près de Rambouillet. S'ils peuvent se rejoindre l'eau ne manquera pas. C'était le raisonnement du ministre.

Louvois charge Monsieur de La Hire, disciple de l'Abbé Picard, de faire des études de nivellement sur ce projet et de voir s'il est possible d'amener l'eau de la rivière d'Eure jusque sur le plateau des Yvelines.

La rivière d'Eure :

Louis XIV fit appel à Vauban qui conçut le projet de détourner les eaux de l'Eure par la création d'un canal sur plus de 80 kilomètres. En 1684, on en vint à adopter un projet qui pouvait paraître réalisable. Louvois propose de construire un canal qui prendrait l'eau dans l'Eure en amont de Pontgouin, soit à 80 km à vol d'oiseau, 81 pieds au-dessus du réservoir de la Grotte à Versailles. Ce canal rejoindrait le système de drainage du plateau de Trappes, à l'étang de la Tour près de Rambouillet. Louvois précise

"les vallons qui n'ont que cinq à six pieds de hauteur ne doivent pas vous obliger à vous détourner, ni pour tracer l'aqueduc de Maintenon, ni pour tracer le cours de la rivière pourvu que cela abrège le chemin."

Le canal prend ses eaux 40 mètres plus haut que les terrasses du château de Versailles, et il se cale dans les courbes de niveau. De pente régulière – 14 à 17 cm par kilomètre, il doit être sans ressaut, sans écluse et navigable. Selon diverses sources, les prévisions du débit quotidien auraient pu être de 50.000m³ par jour.

Cette eau aurait coulé à ciel ouvert dans un canal de quarante kilomètres jusqu'à un point appelé "le Point à Rien de Berchères".

Le terrain s'affaissant, Vauban avait proposé un aqueduc de pierre depuis ce point qu'aucune carte ne précise mais qui pourrait se situer au point où commence la vallée du fond de Berchères, soit environ la côte de 175 m, pour porter le canal de ce point jusqu'à Houdreville, (soit 17 km) d'où l'on pourra rejoindre l'étang de la Tour à ciel ouvert sur des remblais n'excédant pas 8 mètres de hauteur.

 Descendons le canal :

Du barrage de Boizard au "Point à Rien" de Berchères :

Les travaux ne présentèrent pas de difficultés techniques. Les remblais ne dépassaient pas 15 mètres au passage de quelques vallées sèches, et ils furent, semble-t-il, rapidement menés.

Le captage de l'Eure se fait au lieu-dit Boizard, à 8 km de Courville et 3 environ à l'ouest de Pontgouin. Un barrage appelé la Digue de Boizard fut édifié. Il était destiné à emmagasiner une réserve d'eau dans la vallée même, sur 6 km jusqu'à Belhomert. A cette époque, le château de Vaux n'existait pas; la hauteur de l'eau aurait atteint le premier étage de la construction actuelle.

La digue est une belle construction de terre, avec revêtement de maçonnerie, moellons et pierres de taille, jetée en travers de la vallée de l'Eure. Sa longueur est de 201mètres sur 8 mètres de haut. Elle mesure de 12 à 16 mètres de large à son couronnement et 25 à sa base. Elle est percée de deux arches de 2 mètres d'ouverture chacune, accompagnée à l'aval d'un pertuis-éclusé, avec barrage mobile, qui lui ont valu la désignation d'écluse.

A la sortie des écluses l'eau aurait emprunté le cours de la rivière, jusqu'au Moulin de la Ville à l'entrée du bourg, pour entrer ensuite dans le canal qui coupe la route du Moulin à Tan et se dirige derrière le village pour passer au-dessus du Moulin Saint-Etienne. Le canal laisse quelques vestiges, visibles en sortant du village, principalement marqués par des bois au-dessus des étangs de l'Eure. Il se dirige vers Landelles en longeant la D920, toujours visible dans les parties boisées pour épouser la courbe du terrain – c'est la Rivière Neuve. Le canal passe alors au nord de Courville, au-dessus de Vaujoly, où, dans les labours il n'est plus visible.

Pour qui cherche le canal, celui-ci est toujours visible au Brosseron, puis en direction de Fleurfontaine, toujours dans les bouquets d'arbres de la Butte du Four et de la Chambraye. Pour passer la vallée du Coisnon, une construction souterraine assez importante, "l'Arche du Mulet", existe toujours. En continuant vers l'est, le Pont Carreau, porte le nom d'une pont complètement disparu. Plus loin, les petits bosquets longeant le chemin de la Chauvelle ne cachent rien d'autre que la fausse rivière qui contient encore par endroits de l'eau, puis on trouvait ce que l'on appelait l'Arche de Paris, qui était un pont où passait la route de Paris, puis, avant Fontaine-la-Guyon, un autre pont dit l'Arche de l'Eglise.

Vauban avait pensé pour la continuité des chemins et des territoires agricoles à établir des ponts qui devaient avoir une seule arche haute pour laisser passer les bateaux. Des 27 ponts prévus, un seul subsiste, à la sortie des écluses des Boizards au moulin.

Nous arrivons à Fontaine-la-Guyon. Dans le parc du château, une portion du canal a été récemment restaurée sur 260 mètres. Comme son tracé passait à l'emplacement du château de Fontaine, celui-ci fut démoli. (Il en reste encore un pavillon carré et le portail). Un nouveau château fut construit plus loin. On trouvait quelques traces du canal en ville, mais des constructions modernes ont effacé ces vestiges.

En allant sur Saint-Aubin-des-Bois, des petits bosquets cachent encore la fausse rivière qui longe la D24. Il y a particulièrement au lieu-dit le Bois Bellier, dans la plaine un magnifique témoignage boisé de ce canal. Au nord de Saint-Aubin-des-Bois on distingue bien le bourrelet des terres brassées. Le canal suit le bas du bois de Bailleau et longe la D121 vers Dallonville.

Avant d'entrer dans le hameau, le canal est plein d'eau sur une grande longueur et ceci permet d'avoir un aperçu de ce qu'étaient réellement les travaux entrepris. Malheureusement, en remontant vers le nord, le canal a servi de décharge. Le tracé traverse la D939, coupe en partie la forêt de Bailleau, enjambe la vallée de la Berg-op- Zoom par une arche maçonnée. Vers Briconville on trouve le "Pont Louis XIV" et une rivière sèche passe sous le canal. Celui-ci continue dans la plaine sous le nom de la "Rivière de Louis XIV", vers la plaine de la Bréqueille, là, une arche sur la vallée de Bonne-Herl a disparue

Le canal continue dans des levées de terre boisées vers Saint-Germain-la-Gâtine, réapparaissant dans des bois ponctués des mares. Sur la D134, avant la Mare Rouge, se trouvait l'Arche de la Bréqueille, mais là, l'ouvrage a, lui aussi, totalement disparu vers les années 1900.

Du Point à Rien au Bois de Fourches :

Dès février 1685, les premières études réalisées par Vauban devaient aboutir à un ouvrage à trois niveaux d'arcades, dont la partie haute s'étirerait sur près de 17 kilomètres, de Berchères-la-Maingot au Bois de Fourches (commune de Hanches). En mars 1685, il fut décidé que toutes les parties de l'ouvrage d'une hauteur inférieure à 60 pieds seraient réalisées en terrassements et remblais, nécessitant néanmoins la création d'un tunnel pour échapper aux voies existantes. Il fut décidé que du Point à Rien de Berchères, le canal serait porté sur une levée de terre de mille deux cent quatre-vingts mètres, jusqu'au Fond de Berchères. De l'autre côté de la vallée, vers Théléville, cette levée devait avoir quatorze mètres d'élévation, et du côté Maintenon, au point de raccordement avec l'aqueduc de pierre, vingt et un mètres. La levée de terre devait avoir six mille mètres de longueur.

La vallée du fond de Berchères devait être franchie par un aqueduc de pierres, mais il ne fut jamais édifié. Une gravure que possède le musée royal de Stockholm, en Suède indique :

"Profil de lac'queduc de terr et maçonnerie, entre Bairchères et le village de Fourches ayant en longueur 6 541 toises".

L'intérêt de ce dessin de "chic" et non d'architecture, est de nous montrer l'aqueduc projeté dans le Fond de Berchères. Il est à deux niveaux : 30 arches pour le premier, 38 pour le second. Il rejoint les extrémités des levées du côté Berchères au côté Théléville (1 062 mètres). Sur ce plan figurent également les "tuiaux" qui devaient assurer par siphon le passage de la vallée. Ces tuyaux furent-ils rajoutés sur le plan lors de la décision de ne pas construire l'aqueduc à deux niveaux, ou était-ce une variante prévue en attendant la reprise du projet initial, ce qui ne fut jamais envisagé.

Pour sa part, le duc de Noailles écrit en 1848, que cette vallée, longue de mille mètres environ, aurait été franchie au moyen d'un aqueduc de pierre à trois rangs d'arcades . . . Le passage de la vallée fut en fait prévu sous forme de siphons, solution préconisée par Vauban, qui, malgré un long contentieux avec Louvois, finit par avoir gain de cause.

Le duc de Noailles nous apprend également que "jusqu'à Berchères les travaux furent rapidement menés. Et le 25 août 1685, l'Académie s'y transporta en la personne de La Hire, de Cassini, de Sedilleau, et de plusieurs de ses membres pour assister à l'eau dans le canal qui devait avoir lieu, comme épreuve ce même jour. L'épreuve réussit complètement, et l'eau arriva sans obstacle de Pontgouin à Berchères."

Les travaux ayant commencé au printemps 1685, il a fallu faire diligence quant à la conduite de ces travaux car il y avait quelques arches supérieures à construire.

Le siphon de Berchères :

Notons que le mot 'siphon' n'est jamais utilisé tant par Vauban que par Louvois, ou par les entrepreneurs de travaux : on trouve les appellations 'puits' pour les ouvrages verticaux et aqueduc pour les ouvrages horizontaux, ensemble que de nos jours nous appelons entonnoir.

A l'extrémité de la levée de terre côté Berchères, se trouve l'entonnoir amont, qui comprend un puits elliptique de 4,85m sur 3,15m et de 15,40m de profondeur (mur de pierre et de ciment) précédent une voûte très surbaissée de 42,70m de longueur. L'intersection du puits et de la voûte est renforcée par une robuste arche de pierre. En avant de la voûte, une galerie aérienne, longue d'environ 10m, semble disparue, ses matériaux ayant été récupéré.

Les pierres de parements en grès ont été arrachées et il est difficile, en l'absence de plans, de définir comment l'eau continuait son trajet dans les tuyaux de fonte.

Des fouilles archéologiques ont été entreprises durant l'été 1998, afin de définir le modèle de prise de l'eau. A l'extrémité de la sortie du tunnel ? A l'articulation du puits et du tunnel ? ou au sommet du puits comme pourrait nous indiquer le plan de Heurtier et Coulomb de 1780.

Un tunnel dit l'Arche de la vallée, et qui mesure 161 mètres de longueur, 4,80m de large et 6,50m à la clef, est également construit en briques avec assises et cordons de pierre de grès, traces de pavage en silex et béton, construit pour permettre l'écoulement des eaux dans la vallée, perpendiculaire aux Terrasses et permettre le passage de la rivière sèche de la vallée du Fond de Berchères ainsi que celui des paysans et des chariots sous le barrage de terre afin de réunir les terroirs

Ce tunnel semble démesuré et l'on se pose des questions sur sa finalité. Sa longueur de 161 mètres semble pourtant être la largeur de l'emprise des travaux de terrassement, donc, de la largeur de la propriété royale. Cette longueur pourrait aussi laisser supposer qu'il fut envisagé de traverser cette vallée par un énorme ouvrage de terre supportant le canal à ciel ouvert. Etant donné la hauteur de cet ouvrage, la base de ce remblai aurait dû avoir 160 mètres de large, et calée entre les extrémités de cette grande arche. La présence de talus situés de part et d'autre du CR 33, et perpendiculairement à l'axe général pourrait aussi s'expliquer ainsi. Notons également que cet ouvrage n'est jamais cité dans les écrits de l'époque.

L'ouvrage n'a pas subi de gros dommages depuis son abandon. Le sol en silex et béton, faute d'entretien, a été disjoint et emporté par les eaux et ne subsiste que sur quelques mètres carrés. Les pierres nobles qui formaient l'encadrement des entrées et les parements ont été en partie pillés. Des arbres ont poussé sur le sommet du tunnel et il semblerait que par de gros orages, des traces d'eau se découvrent au sommet de la voûte. De récentes coupes de bois ont permis de dégager des ondulations de terrains, travaux préparatoires à un nivellement ou à des pentes pour les tuyaux. Elles ont aussi 160 mètres de large. De même apparaissent des fossés de drainage de chaque côté des ouvrages de terre. Ils auraient conduit les eaux de pluie et les eaux d'infiltration vers le lit de la rivière sèche.

De l'autre côté de la vallée se trouve, côté Théléville, l'entonnoir aval, à 1 062 mètres. Son puits elliptique à 3,40m sur 4,80m. La profondeur de son puits est de 10,50m, la longueur et sa voûte de 42m, d'une hauteur de 2,55m. Comme au siphon aval, il semble y avoir eu une galerie aérienne d'environ 10m, également disparue par le pillage des matériaux.

Ces trois ouvrages semblent avoir été terminés, et côté Théléville, le canal est encore tracé sur deux ou trois cents mètres. Ensuite, l'on s'aperçoit de l'abandon du travail sur les Terrasses.

 

Les Terrasses :

Le talus, "Les Terrasses" devait donc se raccorder à l'aqueduc de pierre de Maintenon. Ces terrasses, droites, ont une emprise d'une centaine de mètres à leur base. De part et d'autre, la terre amassée pour former le talus, a laissé des fosses que l'on appelle "les Fouilles", larges de 70 mètres, profonde d'une dizaine, et qui se sont remplies d'eau. L'ensemble peut faire jusqu'à 250 mètres de large.

De nos jours, boisées, les terrasses accueillent animaux, oiseaux et une flore que ces lieux peu visités, protègent.

La largeur de la levée de terre à sa partie supérieure, où se trouve le canal de la nouvelle rivière, est de 60 pieds (21 mètres), soit 15 pieds pour la largeur du fond du lit (4,62m), 16 pieds pour la largeur horizontale des deux talus intérieurs et 9 pieds de chaque côté pour chacune des chaussées qui longe le canal en terre. La profondeur du canal est de 6 pieds (1,95m). Sur la commune de Bouglainval, un tunnel pour piétons et animaux, long de 70 mètres, passe sous les terrasses (le Trou Dolent). Sur la commune de Chartainvilliers on découvre un autre tunnel identique au précédent et aussi dégradé, à 100 mètres à l'ouest de la D106. Puis un tunnel de briques, dit "la Grande Voûte", avec assises et cordons de pierre d'une quarantaine de mètres de longueur, construit pour permettre le passage du chemin de Chartainvilliers à Boisricheux (commune de Pierres), aujourd'hui D327.

Sur la commune de Maintenon on découvre deux entonnoirs qui auraient pu être reliés par un tunnel. Le premier, à environ 400 mètres de la Grande Voûte, est long de 30 mètres et son puits est d'une profondeur de 5 mètres. Visiblement il n'est pas terminé et construit sur la terre des Terrasses, il est très dégradé. L'autre entonnoir, à l'extrémité de la levée de terre des Terrasses côté Maintenon mesure 78 mètres de longueur. La profondeur de son puits est de 15,10m. Il est moins dégradé, mais là aussi, il semble abandonné en cours de construction.

Rappelons que le canal est conçu avec 15cm de pente au kilomètre. D'une part, à la Grande Voûte il manque environ 3 mètres de terrassement pour assurer cette pente régulière. Et d'autre part, à l'entonnoir situé sur les terrasses VotVoapite (départ du siphon qui devait traverser toute la vallée de l'Eure, et reposant en partie sur l'aqueduc de Maintenon construit) il manque plus de 4 mètres.

La route D106 de Chartainvilliers à Bouglainval passait sous la "petite voûte" qui existait encore en 1838. Pour sa part la route D136 de Théléville à Bouglainval entaille les Terrasses mais est de création postérieure.

Avant de parler de l'abandon des travaux, citons deux études qui, cent ans plus tard, dans le but d'amener de l'eau potable à Paris, rouvrirent le dossier de la fausse rivière d'Eure.

Celle du baron de Marivetz, qui va décrire le parcours des ouvrages existants déclare :

"Ce projet attribué, très mal à propos sans doute par quelques personnes à M. de Vauban, ne peut être de lui." Il conclut à la fracture des tuyaux rampant sur le sol et préconise des tuyaux enterrés, car dans le sol la température est à peu près égale l'hiver et l'été. Cet ouvrage, dédié au Roi, se présente sous une forme manuscrite et est de 1784.

Une autre étude "Plan et Profil en long de la nouvelle rivière d'Eure", par Messieurs Heurtier et Coulomb (1780), est le seul plan que nous possédons. Il prévoit de saisir les eaux dans des tuyaux dès le puits amont, et non à la sortie du tunnel, de traverser le Fond de Berchères, de remonter l'eau par des tuyaux qui la dégorgerait directement dans le canal par le puits aval. L'eau descendrait les Terrasses et cascaderait dans le petit siphon et le grand siphon côté Maintenon. Ce n'est pas réaliste, car l'eau libre se retrouverait à la cote 144, au Buisson-Pommeraye. Bien que de l'autre côté de la vallée de l'Eure le village du Parc se trouve aussi à la cote 144, le siphon, prévu sur le premier étage de l'aqueduc, n'aurait pu monter l'eau qu'à cette cote, or l'étang de la Tour est à la cote 168.

L'abandon de l'aqueduc à trois niveaux a déstabilisé l'entreprise. Le système des siphons pouvait parfaitement fonctionner, mais il fallait toujours rester au-dessus de la cote 168, en tenant compte d'une perte d'un pouce pour cent toises (0,27cm pour 1,949km, soit pratiquement 15cm au kilomètre) entre Maintenon et l'étang de la Tour.

Les terrasses de terre et l'aqueduc de pierre devaient avoir 21 mètres de haut à leur jonction, soit, côté Maintenon, environ à la cote 171.75.

Quand on admire les Terrasses côté Maintenon, pensons qu'elles devraient s'élever bien plus haut dans la plaine, jusqu'à 21 mètres dans son extrémité côté Maintenon, mais l'existence du petit siphon sur les Terrasses abaissait cette hauteur d'environ 5 mètres.

Bien des personnes se sont lancées dans des supputations quant à la réalité de l'arrivée de l'eau à l'étang de la Tour. Certains ont même avancé que la guerre ne fut qu'un prétexte pour arrêter ces travaux, car le doute subsistait quant à la faisabilité du projet, comme l'ont affirmé certains malveillants sous la Révolution. Mais l'heure était alors à la révision de l'histoire !

De récentes mesures de nivellement confirment la véracité du projet de La Hire et la faisabilité de la "fausse rivière", jusqu'à Rambouillet, si l'on respecte la hauteur des Terrasses, la pente prévue et la mise en charge des siphons. Mais il y aurait eu encore au moins deux ou trois ans de travail.

L'aqueduc

Le franchissement de l'Eure à Maintenon fut abordé de la même manière que celui de la Vallée du Fond de Berchères.

Louvois préconisait la solution de l'aqueduc colossal, qu'il n'aurait sans doute pas manqué d'assimiler aux plus monumentaux ouvrages d'art romain, ou "digne des chinois", plus compatible selon lui, avec la magnificence royale.

Dès février 1685, les premières études réalisées par Vauban devaient aboutir à un ouvrage à trois niveaux d'arcades dont la partie haute s'étirerait sur près de 18 kilomètres, de Berchères-la-Maingot au Bois de Fourches. En mars 1685, nous l'avons vu, il fut donc décidé que toutes les parties de l'ouvrage d'une hauteur inférieure à 60 pieds, seraient réalisées en terrassements et remblais. L'aqueduc à construire se ramenait alors à une longueur de 5 047 mètres, supportant à 73,32m de haut le canal de 2,48m de large sur 1,89m de profondeur.

Devant le caractère démesuré du projet, son coût, ses délais d'exécution, Louvois se rendit aux arguments de raison et adopta la solution mixte : aqueduc et puits réunis par canalisations en fonte, faisant office de siphons.

L'aqueduc de Maintenon est la seule partie célèbre de ce canal mort-né. Il fut ramené à des dimensions plus modestes, et à un seul niveau de 28,50m de haut, à 47 arches simples, se développant sur 955 mètres, le raccord au canal lui-même se faisant par des tuyaux.

Le premier projet de Vauban consistait en un aqueduc à un seul étage d'arcades supportant une conduite forcée en siphon. Mais Louvois avait fait abandonner ce projet au profit d'un aqueduc plus spectaculaire. Il avait écrit à Vauban "il est inutile que vous pensiez à un aqueduc rampant, dont le roi ne veut pas entendre parler. Si le mémoire ci-joint n'est pas suffisant pour vous en faire comprendre la raison, la volonté du Maître doit vous en empêcher de plus en parler". Mais on reviendra aux siphons.

Madame de Sévigné écrivit

"une grande beauté doit bientôt paraître à la cour, toute pure, toute fraîche, toute naturelle. Mais quelle surprise – je trouve tout d'un coup que c'est une rivière . . qui est détournée par 40 000 hommes. Il n'en faut pas moins pour lui faire un lit."

Les archives de Chartres détiennent un grand nombre de procédures intentées contre les habitants de Maintenon qui détruisaient l'aqueduc. Les amendes étaient faibles, d'autant que l'on ne reprenait pas les pierres faute de preuves qu'elles aient été volées sur les ouvrages.

De 1709 à 1782 des ordonnances dressent des amendes contre les destructeurs. Louis XV lui-même fera enlever des pierres pour construire à Crécy-Couvé un château pour Madame de Pompadour.

Bien qu'ayant servi comme de nombreux autres monuments désaffectés, de carrière de pierres, les restes de cet ouvrage ne manquent pas de majesté.

Peu après le village du Parc, le canal construit en terrasses, partait vers Houdreville jusqu'à l'étang de la Tour. Le siphon qui devait remonter l'eau sur cette terrasse ne fut jamais construit. Des travaux préparatoires furent effectués à Haute-Maison, à Cerqueuse et à Craches, mais leur hauteur est nettement insuffisante pour assurer l'écoulement naturel de l'eau. Il y avait un ouvrage à effectuer avant l'étang de la Tour, mais toute cette partie ne fut qu'ébauchée avant d'être abandonnée. Imaginez une terrasse de 25 kilomètres sur ce plateau ? Le paysage avec les fouilles et le boisement de la terrasse en eut été totalement changé.

  

Les travaux

Commencés en 1684, les travaux se poursuivront jusqu'en 1692. On assurera l'entretien jusqu'en 1695, et l'on paiera les éclusiers jusqu'à cette date.

Louis XIV se rendait régulièrement chaque année en grand apparat sur le chantier. Le 16 septembre 1685 "ayant visité à cheval tous les travaux qu'il faisoit faire pour les aqueducs, par lesquels l'eau de la rivière d'Eure devoit venir à Versailles . . . Il visite les travaux jusqu'à Gallardon où il coucha. Le lendemain il partit de bonne heure à cheval et alla encore visiter les mêmes travaux en passant par Maintenon, et ayant dîné à Berchères-la-Maingot, il vint coucher à Chartres"

Le marquis de Sourches ajoute "c'étaient des travaux dignes des anciens Romains, et après les dépenses effroyables, on doutait encore s'ils pouvaient réussir heureusement"

En mai 1686, Louis XIV vint à Gallardon visiter les travaux. Les notables de la ville se rendirent au-devant du cortège royal. Le roi visita les carrières, les fours à chaux et lança une pluie de pièces de monnaie à la foule. En juillet le roi est à Maintenon "ces ouvrages avancent fort et l'on est assuré du succès ". Il inspectera Berchères-l'Amingot, et la venue des eaux dans des tuyaux qui amènent l'eau dans les rigoles aux quatre vents ou ailleurs où campent les régiments. Il retournera quelques fois visiter les travaux et il fait commencer la maison et les jardins de Maintenon.

Le 2 septembre 1686 les ambassadeurs de Siam viennent à leur tour visiter les lieux "Ils allèrent à Maintenon voir les travaux qu'on y fait. On leur fait voir toute l'infanterie sous les armes. Les officiers les saluèrent de la pique, et l'on pris l'ordre d'eux . On leur rendit toutes sortes d'honneurs."

Le 15 septembre le roi fait la revue du régiment des Dragons de la Reine et des 22 bataillons qui sont campés à Maintenon pour y travailler. Il les vit sur une ligne, puis les fit défiler devant lui. Le 16, le roi, après son dîner, alla visiter les travaux qu'il trouva très bien conduit et bien avancé. On va envoyer en quartier d'hiver les troupes qui y travaillent.

Dans les années suivantes, le roi fera quelques visites plus ou moins spectaculaires, car il aimait faire parader les troupes. L'intérêt du roi n'est plus aux plaisirs donnés par les fêtes de Versailles, mais par la guerre qui va durer dix ans.

Dès la fin de 1685 Vauban a quitté le chantier du canal pour aller fortifier les frontières de l'est. La guerre va ravager l'Europe

L'on dit que 30 000 hommes, dont 20 000 soldats travaillèrent sur le chantier, ce qui posa bien des difficultés avec la population locale, elle aussi réquisitionnée. Cette opinion courante n'est vraie qu'approximativement, et demeure plutôt au-dessus de la vérité. Il n'y aurait eu qu'une douzaine de milliers de militaires à la fois, principalement ceux des régiments dont l'attitude avait été jugée trop modérée lors des répressions anti-protestantes, à la suite de la révocation de l'Edit de Nantes en1685. Le total de ceux qui furent envoyés ne paraît pas supérieur à 17 000. Les régiments campèrent le long du canal en construction et se déplacèrent au fur et à mesure des travaux.

Les soldats montrèrent peu de zèle ; il plut considérablement ces années-là. Il n'y avait pas assez d'outils et les hommes restèrent inactifs. Les ouvrages étaient dégradés par les intempéries et "les exhalations de tant de terres" occasionnèrent des maladies.

Dès 1685, Louvois conclut un grand nombre de marchés avec des entrepreneurs venus souvent de loin. Douze millions de briques furent commandées à Lille, à la briqueterie Royale d'Abondant. D'autres furent fabriquées sur place. Des fours à chaux furent édifiés à Maintenon, à Berchères-la-Maingot, à Gallardon, et à Pontgouin. On fit venir du charbon d'Angleterre, de Newcastle - le plomb de Hull.

Si les parties courantes du "Canal de l'Eure" se constituaient essentiellement en travaux de terrassement et de remblai, le chantier de l'aqueduc nécessita des moyens considérables. Il fallait transporter les matières pondéreuses : bois, charbons, briques, les pierres des carrières ouvertes à Epernon (Cady), la chaux tirée du calcaire brut des carrières de Gallardon (Germonval), et du Parc à Maintenon, dès juillet 1685. Vauban fit acheter un grand nombre de chevaux à Reims, Troyes et Pontoise. Les paysans louaient leurs chevaux 40 sols par jour, mais ils furent réticents aux travaux du canal. Il fallut acheter du bois pour construire les baraquements pour abriter civils et militaires.

Il fallut commander brouettes (16 000) tombereaux (400), pioches (12 000), surtout pour les Terrasses.

Les fièvres et le scorbut firent de nombreuses victimes. Entre les documents officiels, dont beaucoup ont disparu, et la fable, il est difficile d'appréhender le nombre de victimes. Louvois avait le souci de la condition matérielle des troupes et des malades. Si le pain et la viande furent suffisants, les ressources en eau s'amenuisèrent et les puits creusés étaient d'un médiocre débit. Louvois dut se battre avec les fournisseurs de boissons et les prostituées. Il y eut des désertions et la peine de mort était prévue. Peu de déserteurs furent fusillés car on préférait les envoyer aux galères. Il y eut des vols, des assassinats, des bagarres entre soldats et paysans.

Il fallut aménager le cours de l'Eure, le tirant d'eau n'étant pas suffisant, on dut canaliser la Voise et la Drouette. Dès mai 1685, la Drouette sera canalisée d'Epernon à Villiers-le-Morhier, barrée par 6 écluses, ainsi que la Voise, barrée par 4 écluses. Ces écluses ont disparu depuis l'abandon des travaux, mais leur tracé est toujours visible.

Comme la Voise a un débit insuffisant, une partie des eaux de l'Eure fut détournée depuis le Moulin Neuf à Jouy, par une rigole en corniche sur la rive droite de la rivière jusqu'à Baglainval. Celle-ci est toujours visible par quelques levées de terre avant Saint-Piat et dans les bois au-dessus de la route D18. De même il fallut aménager le long de l'aqueduc deux petits canaux parallèles pour faciliter l'approvisionnement du chantier. Celui du nord existe encore.

Les ponts

Les cartes de la fin du 17è siècle nous montrent l'emplacement des ponts prévus sur la fausse rivière. Si au moulin de Boizard il subsiste un pont que l'on peut attribuer à Vauban, les autres ponts furent ils construits ? Une gravure représente trois ponts à D'Allonville (commune de Bailleau-l'Evêque) d'après un original conservé à la Bibliothèque Nationale (1696). Les cartes que l'on peut consulter au Service Historique de l'Armée de Terre à Vincennes (S.H.A.T.); à la Bibliothèque Nationale, site Richelieu, ou aux Archives Nationales; à la consultation de Champtiers des années 1750 aux Archives Départementales d'Eure et Loir nous montrent 27 ponts construits dès 1685 (4), en 1686 (9), les autres devant être terminés en 1689, ce qui n'est pas prouvé pour tous.

Une délibération du conseil municipal de Saint-Germain-la-Gâtine, en 1852, proposait "de démonter les trois ponts qui sont dans un état de nuisance et de délabrement absolus sur l'ancienne rivière, vulgairement connue sous le nom de Louis XIV

De nos jours la continuité des routes se fait par des remblais qui coupent la rivière. Lors de la construction de cette rivière, des blocs de pierre furent certainement posés de part et d'autre de la rive. Les ponts furent-ils ensuite maçonné, ou posa-t-on seulement des bois pour réunir les terroirs. Les terriers de 1745 nous indiquent bien les chemins à travers la rivière, mais s'agit-il de ponts en pierre, en bois, ou simplement du remblayage. Leurs matériaux furent certainement pillés dès l'abandon du projet.

En 1750 certaines parties de la rivière neuve sont en friche, et même plantées d'arbres.

A la fin du XVIIIe siècle – en 1780 – le détournement de l'Eure apparaît encore comme l'un des moyens de procurer à la ville de Paris un cours très abondant d'eau potable parfaitement salubre.

Il y eut le projet de Heurtier et Coulomb, l'étude du Baron de Marivetz, puis vers 1793, un dernier projet, certainement de Heurtier. Coulomb, membre de l'Institut, tenta en l'an X de reprendre les travaux, mais les projets restèrent dans les cartons.

La fausse rivière jamais ne coula, et l'aqueduc fut abandonné à la vocation d'une ruine gigantesque, morceau de choix à la manière de Hubert Robert.

Finis les rêves de gloire pour le bel aqueduc dont Chateaubriand écrivait : "les aqueducs romains ne sont rien auprès de l'aqueduc de Maintenon, ils défileront tous sous un de ses portiques". Et Saint Simon put dire "qu'il n'en restait que d'informes monuments qui éterniseraient cette cruelle folie".

 

G.Despots

G.Bouquin

 

 

 

 

Les documents (textes et cartes) sont consultables aux Archives Départementales d'Eure-et-Loir, aux services historiques de l'Armée de Terre, à la Bibliothèque Nationale, sites Richelieu et Tolbiac, aux Archives Nationales, à la Bibliothèque de l'Académie des Sciences à l'Institut de France.

 

Bibliographie :

- Gazette 1695 : Conditions sous lesquelles on entreprendra les ouvrages de l'aqueduc de Maintenon;
- GUIFFREY Jules : Comptes des Bâtiments du Roi ;
- DANGEAU : Mémoires et Journal (publication 1734) TGBNF
- Marquis de SOURCHES : Mémoires secrets et inédits de la Cour de France (publication 1836) TGBNF
- de MARIVETZ : Description de l'Aqueduc de Maintenon ; 1786,
- CORREARD Alexandre : Journal du Génie Civil , L'Aqueduc de Maintenon par Vauban ; 1846
 - LEROI J.A. : Des eaux de Versailles; 1847
- Duc de NOAILLES : Histoire de Madame de Maintenon; 1849
- Abbé METAIS : Archives du Diocèse de Chartres. Pièces détachées ; 1889,
- MERLET Lucien : Histoire de !'Abbaye de Cou!ombs 
- LEHR Henri : Aqueduc de Maintenon, !a main d'oeuvre militaire; 1901
- EVRARD F.: Les travaux du Canal de l'Eure sous Louis XIV ; 1933,
- COUTURIER Paulette : Tourisme ef Histoire - Le canal de !'Eure dans l'Histoire locale Beauce et Perche, N° 37; 1972. Disponible à la S.A. E. L.
- RATZ Albert et anonyme : Maintenon, de la préhistoire à nos jours (Maison de la Presse Maintenon); ( ) , CNDP-CDDP Eure et Loir - 1983
- GARÇON Pierre-Maurice : Document de la SHARY (Rambouillet); 1981
- VITTE Jacques : Vivre en Eure et Loir, (Ed. Legué, Chartres); 1983
- BOUZY Alain : L'Eure et Loir (Ed. Legué, Chartres); 1985,
- CHATEL Jean-Yves : Les Projets de Transnavigation de Loire en Eure, (S. A. E. L. ) 1996
- BOUQUIN Georges : L'obsession de LouisXIV, !'eau
- LOBGEOIS Pascal : Versailles: Les grandes eaux, 1999

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